Jeudi 07 Juillet
Ce matin je me lève de bonne heure, je sais que je vais fuir cette ville qui m’oppresse dangereuse pour les Wasas, ici l’absurdité est reine.
Ce soir je serais ailleurs, pour le pour le moment j’ai décidé de me balader et de me perdre dans ces ghettos de misère.
Tout mon fric, mes papiers, mon Nikon sont au coffre de l’hôtel à la réception.
Cette nuit j’ai bien dormi, comme abruti devant la somme de problèmes à résoudre et je me sens en forme physiquement.
Je n’ai pas loin à marcher pour être dans le jus, illico s’adapter à encaisser, je sais les images, les regards, les odeurs que je vais rencontrer.
Alors comme statufié devant l’inutilité de ma démarche, je reste les bras lourds, ballants abruti, assommé, les lèvres tremblantes, la douleur intérieure est oppressante elle m’étouffe, je ne suis plus qu’un magma de sentiments à la limite du décrochage.
Je secoue la tête comme pour effacer ces images, ces pestilentes odeurs, ces cris intérieurs qui hurlent ma rage d’être impuissant.
Abasourdi je m’assois pour laisser mes lacrymales vider leur trop plein et enfin après un temps trop long, comme par magie, l’esprit se vide et me laisse pantin avec une grande fatigue qui m’oblige à fermer les yeux, l’habitude n’est pas de mise sur la route elle ne cicatrise jamais.
Comment partager, comment faire comprendre, il ne me reste que l’énormité du pourquoi, je ne peux que constater et aligner, classifier les différences qui me sépare de cette phénoménale inégalité.
Et puis avec lenteur, essayant de ne rien faire transparaitre de mon désarroi, traverser cet océan de misère, canaliser qques regards et laisser apparaitre un sourire rassurant, parlant, mais pas compatissant seulement une légère grimace avenante qui nourrira qques secondes une vie pitoyable, misérable.
Arrondir le dos, ralentir son allure, s’imprégner du moment, se jurer avec force que l’on n’oubliera pas et s’appliquer à trainer d’un pas qui se veut résolu, ses guêtres un peu plus loin.
Ça fait mal, ça fait très mal et seul la fatigue d’une fuite sur l’infini le regard au loin peut, si on allonge le pas pendant des heures, vous abrutir assez pour panser les dommages infligés.
Je rentre reprendre mon sac à l’hôtel comme halluciné encore par cette injustice contre laquelle l’impuissance est de mise et même la réceptionniste moqueuse s’aperçoit de ma peine et me demande si tout va bien.
Elle m’offre un thé, c’est sympa, je ne sais pas si elle a lu dans mes yeux, mais elle est compatissante.
Vous pianoter tout ça maladroitement en sachant qu’il m’est impossible de tout vous dire dans les détails, vous faire comprendre que la seule vraie histoire elle est ici, qu’on ne peut rien savoir, tant que l’on n’a pas vu par soi-même.
Je ne vais plus maintenant me vautrer dans ces marécages de désuétude, je vais aller chercher des paysages, des moments de quiétude dans des endroits où je vais me permettre d’être contemplatif, sans prendre en compte le temps qui passe, simplement apprécier la chance malgré tout d’être ici et de vivre PLEINEMENT.
L’arrivée ce soir vers 17h, un hôtel le plus huppé de la ville ‘’Le Président’’ que des 4X4 de luxe garés devant, mais la bonne nouvelle c’est que dans ce coin perdu ou personne ne va, les prix sont très bas.
A peine 10€ une super chambre propre avec une salle de bain nickel, une télé avec Canal SAT qui fonctionne à merveille, tout est net, bien fait, pas de moisissures, un ventilo qui tourne sans bruit même à grande vitesse, un grand lit confortable, un p’tit bureau pour pianoter mon journal sous la télé accrochée au mur avec une prise de courant à bonne distance, impeccable !!!
Tout de suite à l’arrivée dans cette ville à zébu quand le taxi brousse s’est arrêté en plein centre-ville pour nous débarquer avec mes potes de voyage, j’ai senti le courant passer.
TSIROANOMANDIDY, rien à voir avec Tananarive, une ambiance festive, riante, le pousse prendra mon sac pour qques Ariary et me déposera au Président en 2 minutes.
Il faut que je vous raconte ces 4 heures de bonheur dans le taxi-brousse.
Après l’attente du départ toujours incertaine, je ne suis pas trop mal assis et je vois monté des cartons aérés pleine de poussins 8 au total contenant une cinquantaine de ces petits poulets chacun, ces 400 oisillons piailleront pendant tout le trajet.
Il y en a partout sous les sièges et à côté de la passagère qui a pris une place supplémentaire pour caser qques caisses.
Un homme monte avec un gamin dans les bras, il veut le passer par-dessus les passagers pour l’installer à l’arrière, je suis le mieux placé et je le prends par la taille, le gamin se met à geindre, je ne comprends pas, mais le père m’explique qu’il vient d’être opéré, j’essaie de le prendre sous les bras et j’arrive péniblement sans trop lui faire mal à l’asseoir convenablement.
On est vraiment tous serrés, calé côté vitre je ne suis pas le plus mal loti, un homme presque en haillons hésite à se serrer contre le Wasa que je suis, je perçois son malaise je passe mon bras autour de ses épaules pour gagner les 5cm supplémentaires qui feront la différence.
Les regards autour de moi ont changé, les sourires se multiplient, je suis accepté dans le club des 30 passagers que contient ce minibus.
Je partage mes vivres avec ceux qui m’entourent, et le courant passe.
Quand on s’arrête pour essayer par les fenêtres d’acheter des bricoles à grignoter, je vois que certains ne peuvent pas se payer ce luxe.
Je craque, j’achète tout ce que je peux, des morceaux de poulets, des chips, des bananes, des mandarines, des fruits que je ne connais même pas, des œufs durs, des samossas, et je fais passer le tout à l’avenant dans le minibus.
Certain s’enhardissent et prennent ce qu’ils ont envie dans les paniers qui sont tendus au-dessus de la tête des femmes, au moment de payer je m’aperçois que le chauffeur grignote un gros sandwich qu’il a mis sur mon compte, il se marre, moi aussi.
L’addition est ridicule par rapport au bien qu’elle me fait, le pire dans tout ça c’est que j’arrive tout juste à manger une mandarine et un samossa, libéré comme en lévitation je profite de ces instants à fond, le bonheur à l’état brut.
La musique toujours trop forte avec des tubes Malgaches qui se mélangent avec du Céline Dion, du Francis Cabrel que tout le monde chante
Sommes pas loin du but, le soleil perd un peu de sa luminosité, juste assez pour que l’adret se fasse rattraper par l’ubac et il ne reste que les sommets des collines du paysage qui sont comme illuminés, pendant que l’ombre s’étale sournoise tout autour.
Au détour d’un virage du bon côté du soleil, la plaine onduleuse verte comme un parcours de golf, j’en prends plein les mirettes, oui des images inclassables.
Le Brousse se gare et de suite je sais que j’ai fait passer un courant sympa, on s’occupe en priorité de mon sac sur le toit, les femmes me tapent fort sur l’épaule (Vraiment fort) les hommes me serrent la main ou me tapent dedans.
J’ai des potes dans la ville c’est incontestable, je croiserais surement qques uns d’entre eux pendant ces 3 jours sur place.
Après mon installation à l’hôtel, une descente pour me restaurer, il fait nuit et la lumière d’une gargote me tend les bras.
Langue de zébu en sauce, bouillon qui va bien, assiette de riz, et pour changer une Gold fraiche.
J’appelle Laure, il n’y pas du tout de Wifi et malgré l’espoir d’un Internet Café que l’on m’a dit possible dans le coin, j’ai comme un doute.
Je verrais demain, mais ne vous inquiétez pas si pendant qques jours je ne vous donne pas de nouvelles, j’écris quand même mon journal.
Je suis vraiment au bout du monde, avec Samedi matin 60 à 70 000 zébus qui vont débarquer dans la ville.
La bouteille de 33 cl de rhum Dzama Carte Blanche achetée au retour du restau, sera vidée avec du coca dans le hall de l’hôtel avec des clients qui discutent dans le hall, j’apprends que ce sont les possesseurs de ces beaux 4X4 qui sont garés devant.
On parle de France-Allemagne au foot ce soir, et ils me taquinent en levant leur verre en donnant L’Allemagne gagnante.
On verra bien !! Mais c’est vrai que je m’en fous carrément, GG il n’est pas foot.
J’ai hâte de trainer mes Trespas dans et autour de cet endroit magique.
J’suis bien dans ma peau ce soir, le rhum en définitif je n’en ai pas bu beaucoup les clients de l’hôtel se sont bien servis.
Le plus court message avec 2 mots m’a beaucoup touché ‘’Merci GG’’.
A toi Merci l’homme aux yeux si verts.
Si je peux arriver à faire partager ce voyage et faire de temps rêver avec quelquefois un peu d’émotivité, j’ai gagné.
Ces 2/3 heures journalières à trier mes photos et essayer de vous décrire mes journées, avec souvent des problèmes d’Internet longs et fastidieux, sont récompensées par votre attention à suivre mon périple.
Tout va bien pour moi, tout va bien …
Demain est, et sera un autre jour.
Partir, partir, partir, pour mieux revenir.
Faites attention à vous.
GG
Ambiance Gare routière Tananarive
Ici on vend les tickets pour pas mal de destinations.
Je ne m'en lasse pas
Pneus neufs, embrayages, piéces détachées etc.
Mécano
On fait du silent bloc, des courroies ...
On refait des mâchoires de freins
Brochettes
Litchis chinois et oranges
Pieds nus on change les pneus ...
C'est bon, sucré, collant aux dents mais ça nourrit
Il faudra vous pencher un peu pour ce selfie ou j'ai une tête de clown
400 npoussins qui pialillent ça mets l'ambiance
Arrivée dans cette ville du bout du monde
J'adore ces camions, on a l'impression que rien ne peut les arréter.